Le danger d’une intrusion de l’Onu dans la fiscalité internationale
Depuis quelques mois, on constate que, sans doute à l’initiative des Brics, États qui sont tous des dictatures, l’Onu tente de s’imposer dans le domaine de la fiscalité internationale. Cette situation est étrange parce qu’on ne voit pas, dans la charte de cette organisation, de lien évident avec les questions fiscales. Une revendication des Nations unies est désormais d’avoir un rôle dans la confection des modèles de conventions préventives de la double imposition et, surtout, de tenter d’imposer un traité mondial sur la coopération en matière fiscale.
Des prises de position ont déjà été communiquées officiellement par l’Onu. Elles n’émanent toutefois pas du Conseil de sécurité, qui a des pouvoirs contraignants, mais bien de l’Assemblée générale, dont les délibérations sont dénuées de valeurs obligatoires. À une très large majorité, cette assemblée a ainsi pris position pour la rédaction d’une convention fiscale à l’échelle mondiale, qui devrait “aider les pays du sud” pour leur garantir leur part d’impôt. Il a même été question d’instaurer des impôts obligatoires sur les multinationales et les personnes physiques les plus riches.
Le fait que des majorités écrasantes soient obtenues à l’Assemblée générale de l’Onu n’a rien de nouveau. Cette organisation est devenue un club où les dictateurs sont très largement majoritaires, et où les États démocratiques sont systématiquement en minorité. C’est ce qui est arrivé avec le vote sur un système de coopération fiscale mondiale, approuvé par 110 nations, tandis qu’il n’était pas
voté par la quasi-totalité des membres de l’OCDE, qui sont pratiquement tous des États occidentaux parmi les plus prospères. Quelques-uns ont eu le courage de voter purement et simplement “non” : outre les États-Unis, on y trouve le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie ou encore le Japon. Avec le manque de conviction qui caractérise toujours l’Union européenne sur le plan international, il faut regretter que les États de celle-ci se soient contentés de s’abstenir.
Typhanie Afschrift
Avocate fiscaliste, professeure ordinaire à l’ULB
Jusqu’ici, c’est l’OCDE qui, avec une redoutable expertise, et pas toujours de manière très favorable au contribuable, joue ce rôle dans la coopération internationale. L’avantage est qu’elle est composée presque exclusivement d’États démocratiques qui reconnaissent les principales libertés fondamentales. C’est exactement l’inverse pour la quasi-totalité des 110 pays qui ont voté pour que ce soit désormais l’Onu qui joue un rôle dans cette coopération.
On ne voit pas très bien en quoi il importe, comme le dit la résolution, de garantir aux États du Sud leur “juste part” des impôts. Faut-il vraiment, de cette manière, financer leurs forces armées, leurs gardes présidentielles qui protègent souvent des putschistes, leurs polices politiques et leurs investissements publics souvent gérés par des corrompus ?
Ce serait une faute, pour les États occidentaux d’aider au financement de telles activités, et l’on ne peut raisonnablement, vu ses prestations passées, s’attendre à mieux de la part de l’Onu. Il se justifierait au contraire de réduire le rôle de cette organisation et de le ramener à ce qu’elle aurait toujours dû rester : un club de dirigeants tentant, souvent sans efficacité certes, d’œuvrer pour la paix dans le monde.