Quand l’État perd 160 millions en justice
La question est connue depuis longtemps, parce que la justice belge, sans doute par manque de moyens, n’est pas toujours rapide.
Depuis 2009, un procès oppose l’administration fiscale à un groupe public (sic) finlandais d’énergie.
Le fisc reprochait à cette entreprise d’avoir utilisé de manière « abusive » le système, alors en vigueur, des intérêts notionnels. Ce système avait fait l’objet d’une véritable promotion par les autorités belges, mais, lorsque des entreprises belges ou étrangères pouvaient en profiter, il arrivait fréquemment que l’administration y trouvait un « abus », même lorsque les conditions légales étaient strictement respectées. En l’espèce, la situation était d’autant plus étrange que l’entreprise étrangère faisait partie d’un groupe d’État.
L’affaire a donné lieu à une véritable saga judiciaire, commençant par une défaite du fisc, qu’à l’époque nous avions prévue, devant le tribunal de première instance d’Anvers, puis des passages devant la Cour d’appel d’Anvers, la Cour de cassation, et la Cour d’appel de Gand, qui avaient à nouveau donné raison à l’entreprise.
L’État s’est acharné et a encore perdu après cinq procédures, cette fois de façon définitive, devant la Cour de cassation.
L’objet du litige, qui portait sur plusieurs exercices, est de l’ordre de 160 millions d’euros, que l’État devra rembourser dans la mesure où les sommes auront été payées, et avec les intérêts.
Bien sûr, il arrive à tout le monde de perdre un procès, et il est logique que chacun, y compris le fisc, défende ses intérêts. Mais cette affaire vient bien confirmer qu’il ne faut jamais avoir peur face à la puissance de l’administration fiscale. Il y a des tribunaux pour dire le droit.
Typhanie Afschrift
Avocate fiscaliste, professeure ordinaire à l’ULB