L’Etat spécule et perd

On sait que l’Etat belge s’obstine à détenir une participation majoritaire dans un petit nombre d’entreprises, dont les plus connues sont Proximus et bpost. La participation de l’Etat dans la première est de 53,51 % et celle dans la seconde de 51,04 %. L’Etat se targue fort peu des résultats obtenus dans le cadre de cette participation. Il y a de quoi.

Ceux-ci sont désastreux. L’action Proximus valait 16,66 euros le 20 février 2020. Aujourd’hui, elle est cotée à 7,58 euros et a donc perdu plus de la moitié de sa valeur.

C’est la même chose pour bpost qui, il est vrai a connu, par la faute de l’Etat, un certain nombre de scandales qui n’ont guère amélioré sa réputation
boursière. Cotée à 7,41 euros au 28 février 2020, son action vaut aujourd’hui 3,29 euros. Soit, là aussi, moins de la moitié de sa valeur. Cela veut dire que les contribuables ont perdu plus de la moitié de leur investissement forcé dans ces sociétés depuis que le gouvernement Vivaldi est au pouvoir. On peut difficilement faire pire.
D’autant plus qu’il n’en est pas du tout ainsi de l’ensemble du marché. L’indice Bel20, entre février 2020 et aujourd’hui, est passé de 2.732,80 à 3.733,99 points, soit une augmentation sensible même si c’est, dans le temps, avec des hauts
et des bas. Il en est de même des autres marchés.

L’Etat se plaint souvent de manquer de moyens, malgré l’énormité du niveau d’imposition qu’il fait subir aux citoyens. S’il avait vendu sa participation en 2020, ce sont des milliards d’euros qu’il aurait encaissés. Aujourd’hui, il ne peut plus en obtenir le même prix, mais moins de la moitié. Or, ce qu’a fait l’Etat, ce n’est pas de la gestion, qui serait d’ailleurs alors exécrable, mais purement et simplement de la spéculation. Il n’y a aucune raison de “service public” ou d’“intérêt général”, pour un Etat moderne, à conserver des actions comme Proximus et bpost.

La première exerce une activité dans le secteur des télécommunications comme de nombreuses autres sociétés, y compris des entreprises agréées en Belgique. Elle est pleinement concurrentielle et il n’y a aucune raison que l’Etat belge en soit l’actionnaire. Pas plus que s’il achetait des actions de Lotus, une très rentable société qui fabrique des biscuits, et qui vient de prendre la place de Proximus dans le Bel20 en raison de sa capitalisation boursière plus importante.

Typhanie Afschrift

Avocate fiscaliste, professeure ordinaire à l’ULB

On disait à l’époque de Proximus qu’elle était rentable parce qu’elle procurait de gros dividendes à l’Etat, décidés d’ailleurs par l’Etat majoritaire lui-même pour réduire son déficit budgétaire et non dans l’intérêt de l’entreprise. L’Etat s’est montré un mauvais actionnaire et sa spéculation sur cette entreprise a fait perdre beaucoup d’argent au contribuable.

C’est évidemment la même chose
en ce qui concerne bpost. Le fait que le secteur d’activité de ces entreprises ne soit pas prometteur aujourd’hui ne fait qu’aggraver la responsabilité des gestionnaires étatiques.

On entend aujourd’hui certains économistes plaider pour restituer à l’Etat un rôle de “stratège”.
Les exemples de ces investissements catastrophiques réalisés par les pouvoirs publics incitent au contraire à penser que l’Etat est un aussi mauvais stratège qu’il est mauvais gestionnaire et qu’il exerce mal des missions de plus en plus nombreuses.

Rendons-lui au contraire son vrai rôle, et seulement celui-là : s’occuper de la sécurité et de la protection des libertés comme le prévoyait la Déclaration des droits de l’homme de 1789 …