Notre époque se caractérise notamment par une hypertrophie des pouvoirs étatiques, qui se traduit par une surrèglementation dans de nombreux domaines. Le nombre de comportements interdits
ou réglementés est ainsi multiplié de manière exponentielle, tout comme la quantité d’autorités de toutes sortes chargées de les surveiller. Lorsque la police ne suffit pas à la tâche, on attribue des pouvoirs de police, dans certains domaines, à d’autres autorités, sociales, fiscales et parfois même communales. Le nombre de personnes dont le simple citoyen doit craindre les pouvoirs ne cesse de s’accroître et pratiquement plus personne ne peut être certain d’avoir respecté toutes les règles qui pèsent sur lui.
Mais cela ne suffit pas encore. Depuis une trentaine d’années, les Etats ont trouvé une arme beaucoup plus efficace, qui consiste à charger des entreprises de faire le travail de contrôle
à leur place, gratuitement, et sous peine de sanctions. Le système, qui repose sur le secteur privé, est évidemment beaucoup plus efficace et ne coûte strictement rien à l’Etat puisqu’en plus, on se permet de faire rétribuer ceux qui surveillent ces entreprises par celles-là mêmes qui subissent leur contrôle !
« Le nombre de personnes dont le simple citoyen doit craindre les pouvoirs ne cesse de s’accroître. »
Celles qui sont le plus clairement soumises à ce système, ce sont les banques, notamment dans le cadre d’une législation anti-blanchiment extrêmement rigoureuse. Leur rôle est non seulement
de respecter des dizaines de milliers de pages de réglementation mais aussi de veiller à ce que leurs propres clients respectent les lois, et à les dénoncer dans le cas contraire. Elles sont obligées, comme de nombreuses autres entreprises, de mettre en place des dispositifs leur permettant de découvrir les fautes commises par ces clients.
Ce système a des coûts multiples. Les coûts indirects, jamais mesurés, sont sans doute les plus considérables. L’obligation des banques d’espionner leurs clients et de leur demander des comptes a comme conséquence évidente que les clients ont perdu toute confiance en ces organismes et ne leur disent plus la vérité, de peur de leur fournir des informations qui serviraient contre eux. Avec comme résultat que les banques ne connaissent plus l’exact patrimoine de leurs clients et sont susceptibles de leur donner de mauvais conseils.
Des contribuables qui déclarent leurs comptes étrangers n’osent plus ramener les fonds en Belgique de peur de réactions excessives de la part des banques. On a déjà vu des banques fermer les comptes de leurs clients sans autre raison qu’un vague soupçon concernant les avoirs de ceux-ci dans… d’autres banques.
Il est évident aussi que les coûts causés aux organismes financiers, les banques, les compagnies d’assurances, mais aussi par exemple les fiduciaires, sont astronomiques. Il leur faut acquérir
des logiciels spéciaux pour que (presque) rien ne leur échappe et former du personnel pour faire compléter d’énormes questionnaires, de manière périodique, par leurs clients, alors que ces documents ne présentent pas le moindre intérêt pour leur activité opérationnelle.
Tant que les banques supportaient tranquillement ces coûts, qui constituent pour elles de véritables charges publiques, personne n’osait trop s’en plaindre. Mais il est évident que les banques
répercutent ce type de charges, comme toutes les autres, y compris les impôts.
Aujourd’hui, une banque, ING, a voulu faire apparaître ce coût de manière plus directe en décidant de facturer à une partie de ses clients une redevance pour financer le coût du compliance, soit un service qu’ils ne souhaitent pas vraiment… Une somme qui peut aller jusqu’à 500 euros par an. Voilà au moins qui montre que nous payons un coût considérable pour un système qui ne fait qu’augmenter encore les pouvoirs de l’Etat.