Dans le projet, par ailleurs très dangereux pour les droits des contribuables, du Ministre des Finances pour la réforme de la procédure fiscale, une mesure semble n’entraîner aucun débat, alors qu’elle est symboliquement et significativement importante.

Il s’agit de permettre à l’administration un accès sans limite au registre des bénéficiaires économiques ultimes (registre UBO) des sociétés et associations. Jusqu’ici, la loi permettait seulement d’y avoir accès pour un contribuable déterminé. Ceci lui donnait donc la possibilité d’obtenir toutes les informations du registre concernant une personne, par exemple celle faisant l’objet d’un contrôle.

Le projet vise à supprimer cette restriction, de manière à ce que le fisc ait accès d’emblée à toutes les données. Il ne s’agit donc plus pour lui de renforcer sa position dans un dossier déterminé, mais de faire ce que l’on appelle une « fishing expedition », de rechercher, au moyen de ce registre, des personnes pouvant faire l’objet ensuite d’une enquête.

C’est ce que l’administration appelle le « datamining ».

Il y a pourtant à peine deux ans que l’on a instauré ce registre et que l’on avait prétendu donner toutes les garanties qu’il ne devait pas servir à de la « surveillance de masse ». On voit aujourd’hui que cet engagement n’est pas tenu, et que, comme toujours, lorsque l’Etat contrôle des données à propos des personnes, il en fait, à terme, l’usage le plus étendu possible, sans égard pour la protection de la vie privée.

On voit que l’Etat s’inscrit dans un système de surveillance de masse, où les citoyens sont obligés d’être particulièrement « transparents » envers lui, qui doit décidément tout savoir.

Ce qui est dommage, c’est que le fisc ne fait pas preuve de la même transparence à l’égard des citoyens, alors qu’en démocratie, le principe est tout de même que c’est l’Etat qui doit des comptes aux contribuables et électeurs, et non l’inverse.

Ainsi, personne n’a jamais obtenu du SPF Finances, ni la liste des banques de données dont il dispose, ni les méthodes qu’il utilise dans le cadre du « datamining ». On ne voit pourtant pas pourquoi de telles données, qui concernent l’ensemble des contribuables, devraient échapper à la règle prévue par l’article 32 de la Constitution, celle de l’accès aux documents administratifs.

La paille et la poutre, chacun connaît l’histoire.

 

Typhanie AFSCHRIFT