Que penser du nouveau décret fiscal wallon qui vient d’être approuvé en première lecture et dont l’objet est la mise en place d’un impôt plus juste ?

Si son titre met tout le monde d’accord, peut-on en dire de même de son contenu ?

Bien entendu, nous savons que l’impôt est prélevé pour être redistribué. Cette contribution obligatoire se fonde sur les capacités contributives de chacun. Ainsi, la capacité contributive est liée au principe d’égalité.

Toutefois, il ne faut pas s’y méprendre, la référence aux facultés contributives des contribuables ne doit pas être vue, du moins dans le système fiscal belge, comme une obligation qui serait imposée aux pouvoirs publics de suivre un principe de justice ou d’équité fiscale.

L’idée de ‘l’impôt juste’ est quelque chose qu’il faut néanmoins garder à l’esprit.

Le sentiment que les gens paient leur juste somme d’impôt est fondamental pour garantir la sécurité sociale, la paix et stabilité. Aussi, le concept fonde l’intervention du pouvoir politique, mais qu’en est-il réellement ?

En l’espèce, ce décret porte sur un renforcement de la lutte contre la fraude fiscale et l’évitement de l’impôt, deux notions très différentes. Plusieurs volets sont renforcés.

Nous citerons, le volet procédural qui annonce :

  • l’instauration d’une ‘disposition générale anti-abus’. On rappellera brièvement que l’application d’une telle disposition trouve difficilement à s’appliquer en pratique d’abord parce que l’administration doit en démontrer les conditions et ensuite parce que le contribuable pourra toujours y apporter la preuve contraire.
  • L’augmentation des délais d’investigation et de taxation qui passent de 5 à 10 ans.
  • Ou encore le renforcement des amendes fiscales. Une mesure qui ne fait que confirmer la tendance actuelle quant à une application de plus en plus standardisée par l’administration.

Le volet des droits de succession et d’enregistrement, « plus justes » ?

Rappelons que les droits de succession sont très lourdement taxés en Belgique alors qu’ils n’existent tout simplement pas (du moins en ligne directe) chez certains de nos voisins.

La mesure à retenir est sans nul doute celle des donations bancaires, soit des donations indirectes non enregistrées pour lesquelles le donateur devrait désormais vivre encore 5 ans au lieu de 3 après la donation pour épargner son donataire d’une taxation au titre de droits de succession.

Cela poussera les plus prudents à enregistrer la donation pour éviter tout risque.

D’autres charmantes mesures sont ainsi énoncées dans ce décret, qui nécessitent une application au cas par cas. Nous pouvons vous accompagner dans vos démarches.

Enfin, il ne faut pas perdre de vue que la signature de ce décret arrive dans un contexte économique particulier. Notre pays dont la fiscalité est tournée vers les revenus doit faire face à un lourd déficit en raison d’une diminution de ses recettes.

On continue toutefois tête baissée à prescrire ce qui ne fonctionne pas.

La situation actuelle ne devrait-elle pas être l’occasion pour le pouvoir politique d’utiliser la fiscalité autrement que par le passé, d’adopter de nouvelles règles fiscales plus diversifiées et plus adaptées aux nouvelles réalités ?

Perrine RUDEWIEZ