Dans l’article de l’Echo et du Tijd, que l’on trouvera en annexe, on précise que l’Inspection Spéciale des Impôts serait en train d’ouvrir une enquête sur des clients, ou anciens clients, de la banque suisse Crédit Suisse.
Cette enquête fait suite, une fois de plus, à la réception par la Belgique de données volées dans cette banque. La jurisprudence actuelle ne permet toutefois pas d’invalider les enquêtes et les taxations pour ce seul motif.
On savait déjà que le Parquet avait lui aussi ouvert une enquête, sans doute pour blanchiment.
Il est surprenant que l’administration fiscale croie utile d’ouvrir une telle enquête, et en outre, de l’annoncer via une déclaration au Parlement du Ministre des Finances. On peut même se demander si celui-ci n’a pas enfreint le secret professionnel de l’administration fiscale.
Si c’est surprenant, c’est parce qu’il est très peu probable que des données bancaires datant de la période de 2003 à 2014 puissent encore donner des informations permettant de réaliser des taxations significatives.
Sauf exception, le délai de prescription est en effet de 7 ans, ce qui fait qu’il n’est plus possible de taxer, cette année (et encore, cela paraît fort tard) que des revenus des années 2013 et suivantes.
Or, l’on sait que les revenus de la plupart des comptes suisses ont fait l’objet de régularisations, en général en 2012 et 2013.
Le fisc peut certes enquêter pour savoir si, suite à ces régularisations, les contribuables ont toujours déclaré leurs comptes au cours des exercices suivants, mais il est peu vraisemblable qu’un nombre significatif d’entre eux aient omis de le faire, précisément après avoir régularisé.
Et une taxation des années antérieures serait illégale, le fisc n’ayant même pas le droit de poser des questions sur les revenus dépassant le délai ultime de prescription.
Une accusation de blanchiment ne concerne par ailleurs pas l’administration fiscale, dont le rôle est de taxer, et non de procéder à des enquêtes pénales, pour lesquelles elle est de plus moins bien armée que le Parquet.
On peut en outre douter que celui-ci puisse réellement poursuivre pour blanchiment des contribuables qui ont régularisé tous leurs revenus, à moins de disposer de la preuve que ceux-ci provenaient eux-mêmes d’autres infractions : c’est rare et très difficile à établir après autant de temps. En Belgique, il faut déclarer ses revenus (à l’impôt sur … les revenus !) et non les capitaux.
Les personnes concernées ont donc tout intérêt à se défendre et à invoquer toutes les dispositions légales destinées à les protéger.
Thierry AFSCHRIFT